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Centenaire de la famille Cuvelier à Léoville Poyferré
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Centenaire de la famille Cuvelier à Léoville Poyferré

Un siècle. Voilà un siècle que Château Léoville Poyferré, à Saint-Julien, est porté au firmament de nos vignobles par une famille originaire du Nord de la France, les Cuvelier.
Retour sur l’histoire d’une propriété iconique qui défie le temps.

Du « plat pays » aux graves médocaines

C’est à Haubourdin, dans les faubourgs de Lille, qu’en 1804, Henri Cuvelier fonda le négoce H. Cuvelier et Fils.

Sa maison prospéra pendant tout le XIXe siècle en distribuant des vins français et étrangers aux amateurs du Nord, des Flandres et de l’Angleterre, grande consommatrice de vins de Bordeaux.

Pour célébrer son premier centenaire, déjà, et une activité florissante, les trois cousins, Paul, Albert et Gonzague Cuvelier, acquirent successivement le château Le Crock à Saint-Estèphe en 1903, le Château Camensac en1912, puis en 1920 les Châteaux Moulin Riche et Léoville Poyferré à Saint-Julien.

Parallèlement, une partie de la famille s’installa à Bordeaux où Olivier Cuvelier dirige actuellement la maison de négoce.

Une grande histoire : « Un Léoville, trois domaines »

L’origine du domaine de Léoville Poyferré remonte à 1638.

C’est à l’époque une terre de graves qui porta le nom de son propriétaire, le parlementaire bordelais Jean de Moytié.

En 1740, la propriété passa par mariage à Alexandre de Gasq, seigneur de Léoville, en Saintonge.

A la mort de ce dernier, le vignoble resta en indivision jusqu’à la Révolution.

C’était alors la plus grande propriété viticole du Médoc, celle-ci s’étendant depuis Beychevelle jusqu’au Château Latour.

Léoville traversa le XIXè siècle en donnant naissance à trois domaines.

L’un des héritiers, le marquis de Las Cases, ayant émigré pendant la Révolution, sa part fut confisquée. Vendue comme bien national, elle fut rachetée, après plusieurs cessions, en 1826, par Hugh Barton qui constitua Léoville Barton.

En 1840, les deux enfants du marquis de Las Cases, Pierre-Jean et Jeanne, héritèrent des trois quarts restants.

La part du fils aîné représente aujourd’hui le château Léoville Las Cases.

Quant à sa sœur Jeanne, qui épouse le baron Jean-Marie de Poyferré, elle donne son nom au château Léoville Poyferré.

Ainsi, les trois vignobles, Léoville Barton, Léoville Las Cases et Léoville Poyferré, intégrèrent le classement de 1855, chacun se voyant attribué le titre de Deuxième Grand Cru Classé.

En 1865, Léoville Poyferré fut cédé à Messieurs Lalande et Erlanger, respectivement négociant en vin et banquier, puis acquit par les Cuvelier en 1920

Didier Cuvelier, maître de la renaissance

Soixante ans plus tard, Didier Cuvelier, alors âgé seulement de 26 ans, arrière-petit-fils du premier propriétaire, prit les rênes du domaine.

Il lança un grand plan de restructuration, pour porter la qualité des vins à son firmament. Après une étude poussée des sols, il replanta de nombreuses parcelles, portant de 48 à 80 hectares le vignoble, et rénova le chai.

Il s’entoura également d’une équipe d’un grand professionnalisme et des conseils de Michel Rolland, œnologue mondialement reconnu.

Quelques millésimes marquèrent ainsi la légende de Léoville Poyferré, tel que le 2009, consacré d’une note parfaite de 100, par le célèbre critique américain Robert Parker.

Au XIXème siècle, déjà, le poète Pierre Biarnez exprima son émerveillement pour les vins de Poyferré, dans son délicieux poème « Les Grands Vins de Bordeaux », tout en s’indignant du rang réservé par le classement de 1855 :

« Assemblage parfait de sève, de chaleur,
En lui tout est royal, la moelle, la couleur,
Et je ne comprends pas quel expert inhabile
A pu dans les seconds classer le Léoville. »

Genèse d’un grand vin

Le vignoble de Léoville Poyferré est posé, à l’ouest du village de Saint-Julien, sur un magnifique manteau graveleux, épais et bien drainé.

Son emplacement lui fait également bénéficier d’une double protection naturelle.

L’estuaire de la Gironde, à l’est, tempère les excès de chaleur et les risques de gel, tandis que la forêt des Landes, à l’ouest, l’abrite des vents salins et de la pluie, en provenance de l’océan Atlantique.

C’est dans cet écrin que tous les grands cépages bordelais se déploient à Léoville Poyferré où l’encépagement comprend une majorité de Cabernet Sauvignon (68%), associé au Merlot (24%), au Petit Verdot (2%) et au Cabernet Franc (6%).

Naturellement, sur ce terroir privilégié, tout est fait dans les règles de l’art.

Le travail du sol permet d’entretenir sainement le vignoble, sans désherbant, et tous les travaux manuels s’apparentent à un travail d’orfèvre, en communion avec la nature.

Le domaine s’est engagé depuis 2016 dans une démarche environnementale, par le biais du SME (Système de Management Environnemental) des vins de Bordeaux. Il bénéficie depuis 2017 de la certification environnementale HVE niveau 3 (Haute Valeur Environnementale).

Les vendanges sont faites à la main, les raisins déposés dans des petites cagettes de 25 kg, puis triés deux fois, avant l’encuvage.

A l’issue des vinifications, les vins parachèvent leur élevage pendant 18 mois, en barriques de chênes français, soigneusement sélectionnées auprès des 15 tonneliers fournissant Léoville Poyferré.

Une équipe habitée par la passion œuvre, dans un esprit de famille et humaniste, pour parvenir, à chaque millésime, à la perfection.

Grand artisan du chemin parcouru par le cru durant les trois dernières décennies, l’œnologue Michel Rolland partage son expérience, en soulignant que « Léoville Poyferré enchaîne les grands millésimes, grâce au vignoble très bien préparé, une vinification d’une grande précision, et l’aide d’un climat favorable. »

Il décrit les nectars du domaine « tout en rondeur, avec une puissance et une élégance propre à cette appellation ».

Empreints de finesse et de cœur, les bouteilles sont appelées à une garde remarquable.

Sara Lecompte Cuvelier pour un nouveau chapitre

S’inscrivant dans le temps long, Didier Cuvelier passa la main en 2018 à sa cousine Sara Lecompte Cuvelier.

La transition fut bien préparée. Celle-ci était déjà membre du conseil de gérance du Château Le Crock et du négoce H.Cuvelier & Fils depuis 2003, et des propriétés de Saint-Julien depuis 2011 (Moulin Riche et Léoville Poyferré).

Après un premier Cycle d’études en Administration Economique et Sociale puis une formation à l’Institut de Gestion Sociale à Paris, Sara a occupé des fonctions de responsable ressources humaines dans des grands groupes de restauration puis a évolué dans des postes de gestion d’exploitation.

Elle entama sa reconversion en effectuant un Mastère Spécialisé de Management de domaines viticoles à l’Ecole d’Ingénieur de Bordeaux Sciences Agro, et poursuivit avec un Diplôme Universitaire d’Aptitude à la Dégustation.

Avec Sara Lecompte Cuvelier, l’histoire continue et marque un tournant. Son ambition ? Poursuivre l’engagement passionné et exigeant de sa famille en continuant la quête de la qualité ultime, s’engageant dans une démarche environnementale, et développant la notoriété de la marque.

 

En confiant les destinées de leur domaine à une femme de la famille, la dynastie Cuvelier montra une nouvelle fois son profond attachement à ce terroir historique.

Sara Lecompte Cuvelier

Grand large argentin et proximité avec l’œnotourisme

Ouvert sur le monde, à l’aube des années 2000, les Cuvelier poursuivirent leur descente vers le Sud.

Cette fois-ci, ils traversèrent l’océan Atlantique pour gagner l’Argentine.

Là-bas, ils créèrent la bodega Cuvelier Los Andes, gérée par Bertrand et Jean-Guy Cuvelier.

Ils y produisent des vins, sur un terroir d’altitude situé sur les contreforts de la Cordillère des Andes, issus d’un assemblage de Malbec, le cépage argentin emblématique, de Cabernet Sauvignon et de Syrah.

Parallèlement, à Saint-Julien-Beychevelle, la famille fut parmi les premiers vignobles à ouvrir grand les portes de ses chais, et à proposer des formules d’accueil originales, sous la baguette d’Anne Cuvelier.

Grâce à des parcours sur-mesure, les amateurs découvrent le vignoble, les chais et la philosophie qui anime ce cru légendaire.

Des dégustations innovantes, dites « éclairées », en sont le point d’orgue.

La maitresse des lieux propose alors des associations de différents millésimes du domaine à des charcuteries artisanales, des fromages affinés ou, plus inattendu et novateur, à des chocolats grands crus.

Les résultats sont époustouflants !

 

En 2020, de grandes célébrations, en France et à l’étranger, devaient marquer le centenaire de la famille Cuvelier.

Elles sont suspendues en attendant des jours meilleurs.

Ainsi, l’Union des Grands Crus de Bordeaux tenait à rendre hommage à l’odyssée d’une famille animée par des valeurs partagées par tous les membres de notre association – audace, intégrité, transmission -, et qui s’inscrit, de manière remarquable, dans la grande histoire de notre vignoble.

Ronan Laborde

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